L'écologie, une science évolutive
L'écologie est la science qui étudie les êtres vivants dans leur milieu et leurs interactions.
Le terme écologie vient du grec oikos (maison, habitat) et logos (science, connaissance) : c'est la science de la maison, de l'habitat. Il fut inventé en 1866 par Ernst Haeckel, biologiste allemand pro-darwiniste. Dans son ouvrage Morphologie générale des organismes, il désignait par ce terme : « la science des relations des organismes avec le monde environnant, c'est-à-dire, dans un sens large, la science des conditions d'existence ».
Les réseaux trophiques
On observe dans la zone du Sanctuaire une utilisation optimale du potentiel productif par l'existence de nombreux liens entre le réseau trophique « classique » (du type diatomées - copépodes - carnivores) et « la boucle microbienne » exploitant tout le spectre de taille des particules. Notamment, le réseau microbien recycle rapidement la matière organique dans la couche euphotique et le macro-zooplancton gélatineux constitue un élément important du réseau trophique dans la colonne d'eau. Cette forte ramification du réseau trophique optimise les moments du cycle annuel où la production primaire est minimale.
La Production primaire
La zone du Sanctuaire est marquée par une productivité relativement élevée, de type mésotrophe avec des pics de production primaire pouvant atteindre, en période estivale, des valeurs supérieures à 500 gC.m-2.an-1 en zone frontale.
Cette productivité est provoquée par une panoplie de mécanismes de fertilisation rehaussant le niveau de la production primaire.
A savoir, l'enrichissement par les eaux côtières et les apports hydriques sous-marins, l'effet différé du mélange hivernal apportant les sels nutritifs en surface, la zone frontale séparant les eaux côtières entraînées dans la circulation cyclonique et les eaux du large, des phénomènes locaux d'« upwelling » associés à des tourbillons à méso-échelle, de 100 km de diamètre. Cette productivité favorise aussi l'existence de structures complexes associant divergences et convergences.
Ces mécanismes de fertilisation sont d'autant plus importants que le flux thermique fourni par la mer est relativement élevé dans la zone du Sanctuaire.
La structure en dôme de divergence au centre du bassin liguro-provençal, en favorisant l'ascension de couches d'eaux intermédiaires plus riches en sels minéraux (apportés en grande partie par les eaux fluviatiles) et le refoulement en périphérie des eaux plus légères et moins salées, est à l'origine d'une productivité supérieure à celle du domaine côtier. En effet, le refroidissement hivernal des couches superficielles provoque un brassage vertical permettant au phytoplancton, en particulier les diatomées, de s'épanouir surtout en été lorsque les teneurs en chlorophylle des eaux superficielles sont proches de 2mg.m-3.
La zone de structure frontale à fort gradient de densité est à l'interface des eaux côtières oligotrophes et le secteur central plus riche. Le front liguro-provençal, qui longe à environ 20 milles la côte occidentale corse, la Riviera italienne et à environ 15 et 25 milles la Côte d'Azur, est relativement productif avec en marge une poussée phyto-planctonique printanière et automnale liée à des teneurs en chlorophylle pouvant atteindre 10mg.m-3.
Ces phénomènes sont déterminants dans l'organisation des niveaux supérieurs de la chaîne alimentaire, particulièrement pour les consommateurs tertiaires, les poissons migrateurs et les cétacés spécialement abondants en période estivale.
La Production secondaire
La production secondaire comprend une grande variété d'espèces au sein des catégories suivantes : le zooplancton, les céphalopodes et les poissons.
Le zooplancton est composé d'herbivores (crustacés, tuniciers, mollusques), de carnivores (cnidaires, cténaires, polychètes, mollusques, crustacés, cœlentérés et chaetognathes) et d'œufs de crustacés, de poissons et de mollusques pélagiques. Comme le zooplancton ne peut se déplacer horizontalement, sa distribution et son abondance sont conditionnées par les variations spatio-temporelles de la production primaire.
Le zooplancton se nourrit de phytoplancton. Les migrations verticales nycthémérales du zooplancton conditionnent les activités d'alimentation souvent nocturnes des prédateurs. En effet les couches superficielles peuvent atteindre des valeurs parfois 11 fois supérieures à celles de la journée comme dans le cas du micro-necton en période estivale. Le macro-zooplancton, notamment les tuniciers, les appendiculaires et les méduses, occupent un rôle prépondérant comme filtreurs. Les Euphausiacés sont à la base de l'alimentation de certains cétacés mais surtout des Mysticètes. D'autres familles de crustacés sont présentes dans les régimes telles que les Pasiféidés, les Sergestidés et les Oploforidés. L'espèce principale d'Euphausiacés est d'origine boréale, Meganyctiphanes norvegica. Elle est présente en abondance exceptionnelle au centre du bassin liguro-provençal (jusqu'à 900 ind./1000m 3 dans la couche superficielle par nuits d'été). De même, un Pasiféidé abondant est l'espèce Pasiphaea sivado. Les autres espèces répertoriées sont d'origine tempérée ou boréale : Stylocheiron longicorn, Euphausia krohnii, Nemastoscelis megalops et Nyctiphanes couchii.
Le macrozooplancton gélatineux (salpes, appendiculaires, méduses, etc.) constitue un élément important du réseau trophique dans la colonne d'eau. Cette catégorie faunistique contribue à une meilleure efficacité du réseau trophique par des carnivores « gélatineux » (salpes, appendiculaires, méduses) assurant le transit du flux organique vers les grands fonds par la production de mucus, maillon trophique central entre le nanoplancton et les prédateurs de grande taille.
Les céphalopodes ont un rôle extrêmement important dans la chaîne alimentaire, servant de proies à de nombreux poissons, mammifères marins et oiseaux marins. En dehors de migrations saisonnières liées aux phénomènes de reproduction, la plupart d'entre eux effectuent des migrations verticales nycthémérales, vivant près du fond au niveau du talus et du large, et remontant à la surface la nuit suivant les migrations de leurs proies (petits poissons, autres céphalopodes, crustacés, euphausiacés, siphonophores, polychètes, mollusques). D'autres espèces restent benthiques comme la plupart des sépiolidés et les octopodidés plutôt inféodés au plateau continental. Ces céphalopodes représentent un maillon important dans le transfert d'énergie vers les niveaux plus profonds non seulement pour les cétacés mais aussi pour les espèces benthiques nécrophages.
Les céphalopodes consommés par les cétacés se répartissent de façon suivante :
- des espèces benthiques ou semi-benthiques vivant sur le plateau continental et le talus supérieur servent de proies aux dauphins bleu et blanc et aux dauphins de Risso,
- des espèces pélagiques servent de proie aux cétacés inféodés au talus profond comme les globicéphales noirs et les Ziphius,
- des espèces de tous les étages pélagiques ainsi que des espèces benthiques ou semi-benthiques plutôt inféodées au talus et au large consommées exclusivement par les dauphins communs, les dauphins bleu et blanc, les dauphins de Risso, les globicéphales, les ziphius, des espèces de calmars pélagiques consommées par des petits delphinidés et par des cachalots et des ziphius.
Les espèces de poissons les plus fréquemment consommées par les cétacés sont les anchois Engraulis encrasicolus, les sprats Spratus spratus et les sardines Sardinus pilchardus puis en moindre importance les sardinelles Sardinella aurita, les capelans Trisopterus minutus, les merlus Merluccius merluccius, les chinchards à queue jaune Trachurus mediterraneaus, les maquereaux Scomber scombrus, les bogues Boops boops et les orphies Belone belone. Ces espèces sont aussi prisées par les grands pélagiques (thons, espadons..), les oiseaux marins et l'homme par ses activités de pêche.
En résumé, le schéma des interactions est le suivant :